Alors que Jenifer a déclaré cette semaine stopper la promotion de son album hommage à France Gall et reprenant principalement les chansons de Michel Berger, Ma déclaration, paru en Juin dernier, je me rends compte que je n'ai jamais pris le temps d'en faire figurer sa chronique sur mon blog et il est donc plus que tout d'en parler...
Car même si cet album de reprises a rencontré son lot de détracteurs, France Gall en tête, ce qui a poussé Jen' à passer à autre chose très vite, il n'en demeure pas moins que c'est un album bien ficelé où la belle brune n'a pas à rougir de ses performances ni de ses versions concoctées avec Silvio Lisbonne du duo cannois Mutine et qui avait déjà réalisé son album précédent. Universal en avait tout de même confié le mixage au magicien de studio Londonien Andy Bradfield et c'est une preuve de plus que Pascal Nègre espérait exploiter plus cet album de reprises et en faire je pense une sorte de "Génération Gall" à la manière du méga-succès de l'album de reprises de Goldman de MyMajorCompany. Sauf qu'à mon avis, là où le bas blesse, c'est qu'il ne s'est pas suffisamment soucié de ce que la principale intéressé allait en penser et même si on n'a aucunement besoin d'avoir l'accord de l'auteur/compositeur pas plus de l'interprète original d'une chanson pour en faire une version commercialisée, Pascal Nègre aurait dû sans doute mettre plus de forme envers France Gall, d'autant que d'après certaines déclarations de Jenifer, cette dernière devait bien penser que sa maison de disques avait eu l'accord de Madame Berger... Beau fiasco donc à porter au bénéfice de la major et de son PDG !
Mais fini de parler des mauvaises choses puisque des 12 titres composant cet album, peu m'ont laissé sur ma faim et que, pour les générations ayant connu les versions originales comme pour les suivantes découvrant les magnifiques chansons immortalisées par France Gall, c'est un album indispensable et de très bonne facture.
Et ce sont les délicates notes d'Evidemment, la chanson hommage à Daniel Balavoine de 1988 écrite par Michel Berger pour sa femme, qui font décoller doucement Ma déclaration. Et si sur le refrain, Jen' et son réalisateur ont choisi de mettre un peu plus de pep's et de rythmique pour faire s'envoler le morceau plus haut, plus fort, l'esprit reste le même que la version initiale et c'est heureux, cette chanson étant un pur joyau inébranlable auquel il aurait été difficile de modifier l'atmosphère si touchante.
On ne change pas de décennie ni même d'album original (Babacar de 1987) pour enchaîner avec Ella elle l'a, l'hommage à Ella Fitzgerald. Et là, dès le début, une rythmique très funky prend le pas sur l'atmosphère planante de l'intro et on se laisse emporter par cette version modernisée qui ne s'éloigne cependant que très peu de l'originale, mais ça me va ; on ne touche pas à la perfection et de cette période Gall/Berger qui est celle qui m'a le plus marqué, et vu son âge, Jenifer aussi je pense, il n'y avait pas grand chose à améliorer...
On enchaîne par des choeurs masculins du chanteur corse Chjami Aghjalesi qui ouvrent le bal de Diego, libre dans sa tête. Si France Gall a bien évidemment interprété en 1981 cette magnifique ode à la liberté et à la rebellion de Michel Berger, c'est la version de Johnny Hallyday de 1991 qui a je pense le plus marqué les esprits et Jen' en fait une lecture sobre et linéaire délicatement rehaussé des voix corses pour lui donner de la profondeur. Elle évite l'écueil d'y mettre trop de théâtralité mais ça manque un peu d'émotion pour moi.
Après une brève intro tendance bluesy, la rythmique funky fait décoller la chanson et nous invite à nous remuer le popotin sur Résiste, tube de 1981. On retrouve dans cette nouvelle version la détermination et l'optimisme de celle de France Gall et encore une fois, quand on aurait pu voir une version mise au goût du jour à renfort d'électro péchu, c'est avec basse, guitare et batterie dans l'esprit Berger que le punch a été mis et je ne vois vraiment pas ce qu'on a pu reproché à Jen' sur ce second extrait de l'album.
Besoin d'amour de 1978 et de l'opéra rock Starmania suit et là encore, on est submergé par une basse funky en diable qui dynamise et dynamite le morceau, avec ajouts de cordes très seventies, pour une version bien réjouissante.
Le tempo se calme avec la version dépouillée de Jen' de Si maman si, de 1977. Piano/voix rehaussé de cordes pour une ambiance intimiste et classieuse, délicate et emplie d'émotion.
Changement d'ambiance avec Ça balance pas mal à Paris en duo avec Christophe Willem, qui garde l'esprit boeuf bon enfant et funky de l'original Gall/Berger de 1976 et garde même des petits effets psychédéliques qui laisse le morceau dans son époque originale.
Le morceau suivant, Comment lui dire, de 1975, n'est pas un titre de France Gall que je connaissais vraiment... Disons qu'en l'entendant, le refrain ne m'était pas totalement inconnu, mais ce n'était pas une chanson qui m'avait marqué et là, Jen' se l'approprie vraiment ; on sent qu'elle lui parle et que le choix de ce titre moins connu que les autres vient du coeur : belle surprise donc.
Même époque (1975) mais changement de registre avec La déclaration d'amour, qui ramène l'ambiance acoustique et sobre de Si maman si, mais avec la partition de violencelle qui donne une atmosphère plus sombre au morceau. Les parties parlées nous offrent mieux encore la mélancolie que Jenifer a donnée à cette chanson d'amour et je m'étonne qu'une si jeune artiste choisisse cet lecture désabusée plutôt que d'en faire un titre plus enjoué d'espoir amoureux...
La fin de CD se profile déjà et on délaisse pour deux titres Michel Berger en invitant un autre pygmalion célèbre et défunt, Serge Gainsbourg à la barre, d'abord de Poupée de cire, poupée de son, puis Laisse tomber les filles, tous deux de 1965 (ça ne nous rajeunit pas...) et si le premier a été revampé un peu avec les sonorités d'aujourd'hui, mais il par trop étiqueté Eurovision seventies pour que je m'y fasse, le second est resté dans un esprit rétro loin de me séduire. C'est simple, j'aurais vraiment préféré que Jen' ne revisite que la période Berger de France, avec Il jouait du piano debout, ou Tout pour la musique, Viens, je t'emmène ou encore Cézanne peint, qui lui auraient été comme un gant et mieux que ces deux popsongs acidulées mais vieillottes.
Heureusement, l'album se termine avec une ultime chanson de Michel Berger, et quelle chanson ! Message personnel, plutôt du répertoire Françoise Hardy d'ailleurs ; l'originale date de 1973 quand France Gall ne l'a reprise qu'en 1996 sur l'album France sorti après la mort de Michel et seul album studio qu'elle a enregistré sans lui en reprenant des chansons écrites par lui. La version de Jenifer garde l'esprit du morceau bien sûr puisque c'est une des plus belles chansons du répertoire francophone. Elle ne démérite pas et c'est une magnifique façon, tout en couches de cordes enchaînées, de finir cet hommage. Je ne vois toujours pas ce qui a pu déplaire à France Gall... à part la concurrence de se voir égalée par une jeune chanteuse et d'autant plus enfermée dans la réclusion canonique qu'elle a choisi depuis des années maintenant...
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